Les OGM alimentaires sont-ils naturels ? [difficulté : facile] (2400 mots / ~15 mins)

Beaucoup de méconnaissances et de véritables inconsistances sont souvent à l’origine du rejet des OGM chez des personnes n’étant pas pour autant dans une posture d’opposition idéologique. Cette opposition repose sur l’idée fausse que les OGM seraient intrinsèquement moins bons, car moins naturels, que les autres produits de l’agriculture. Voici donc une courte introduction aux PGM (Plantes Génétiquement Modifiées), dans le contexte des autres méthodes de production végétale.

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[Trad] Pourquoi les climato-sceptiques ont tort

Article posté sur Scientific American par Michael Shermer le 1er décembre 2015.

Dans l’histoire de toute théorie scientifique, seule une minorité de scientifiques, voire même juste un seul- à supporté cette théorie, avant que les preuves ne s’accumulent au point que l’acceptation devienne générale. Le modèle copernicien, la théorie des germes, le principe de la vaccination, la théorie de l’évolution, la tectonique des plaques et la théorie du big bang étaient toutes des idées hérétiques à un moment donné, qui sont devenues des consensus scientifiques. Comment cela s’est-il produit ? Lire la suite

[Trad] Le privilège des blancs ? Les activistes occidentaux vont-ils bloquer l’application de la technologie CRISPR permettant de protéger des millions d’africains contre le paludisme ?

Billet posté sur Genetic Literacy Project par Eva Glasrud et Justin Smith le 9 décembre 2015.

[Note du traducteur : le ton de cet article volontiers incisif n’est pas exactement celui de LTC. Néanmoins, le propos me semble suffisamment important et correct pour le relayer tel quel. Pour débattre fondamentalement avec les auteurs, merci de vous reporter aux contacts mentionnés en toute fin de ce billet]

La technologie CRISPR peut désormais éradiquer une espèce de moustiques vectrice du paludisme en Afrique. Mais les mouvements anti-OGM vont-ils empêcher les scientifiques de sauver des millions de vies chaque année ?


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[Trad] Oui, il y a un fort consensus sur le changement climatique

Cet article a été posté sur The Logic of Science le 8 septembre 2015

Même si vous n’avez jamais véritablement porté attention au « débat » sur le changement climatique, vous avez probablement entendu quelqu’un parler des « 97% de climatologues entérinant le Réchauffement Climatique Anthropique ». C’est un chiffre que j’ai personnellement cité à de nombreuses occasions et qui est hautement contesté par les climato-sceptiques [NdTr : « climate change deniers » dans le texte, le terme français climato-sceptique est équivoque et ne renvoie pas au mouvement du scepticisme scientifique]. En effet, il est rare que je parle du consensus sans que quelqu’un réponde que ce chiffre de 97% est un mythe et que l’étude qui en est à l’origine (Cook et al., 2013) a été débunkée. Ainsi, dans ce billet, je veux parler du consensus sur le changement climatique selon différents angles. Je vais d’abord me concentrer sur l’étude principale de Cook et al., et expliquer ce que les auteurs ont réellement fait, ce qu’ils ont trouvé, et pourquoi leur étude était robuste. Je veux aussi évoquer les critiques communément faites à cette étude. Enfin, je vais passer en revue quelques autres points qui témoignent d’un fort consensus scientifique sur le changement climatique. Lire la suite

[S&M] Le Monde et les OGM, l’obscurantisme et la science (encore)

Hypatia, Charles William Mitchell, 1885, Laing Art Gallery (Newcastle-upon-Tyne).
Hypatia, Charles William Mitchell, 1885, Laing Art Gallery (Newcastle-upon-Tyne).
Résumé : Le 8 septembre, Le Monde a repompé sans fact checking supplémentaire un article du New York Times du 5 septembre à propos du recours administratif lancé par l’association d’activistes américains anti-OGM USRTK (US Right To Know). Les deux articles (le même en réalité) entendent apparemment mettre en avant la corruption des scientifiques favorables aux OGM, sans pour autant être capables d’étayer ces allégations. Car si le mot n’est jamais lâché, c’est pourtant bien de cela dont il s’agit. La mouvance antiscience a semble-t-il sur ce sujet définitivement abandonné le recours aux preuves scientifiques (qu’elle était déjà incapable de fournir) et se porte vers d’autres moyens d’action, au titre desquels la calomnie et l’intimidation. La chose serait seulement scandaleuse s’il elle n’était pas portée par de grands médias nationaux comme Le Monde, et ce depuis plusieurs années. Dès lors, elle est également rétrograde et dangereuse, aussi bien vis à vis du cours des progrès technologiques et scientifiques, mais également de l’intégrité morale et professionnelle des scientifiques visés. Rendez-vous à la fin du billet pour un tl;dr.

Un nouvel article ayant trait « aux OGM » à été publié sur le site du journal français Le Monde, le 8 septembre dernier. Sans surprise, le propos est conforme à la ligne éditoriale du journal sur le sujet depuis plusieurs années, ligne largement partagée dans les grands médias nationaux.

Cet article intitulé « Aux Etats-Unis, des universitaires au cœur de la guerre d’influence sur les OGM » rapporte les activités récentes d’une association américaine d’activistes anti-OGM, la USRTK, pour US Right To Know, créée en janvier 2015. Comme il me semble être généralement le cas de toute association d’activistes, celle-ci semble être aussi bruyante que peu représentative des aspirations de la population générale sur le sujet. Cet antagonisme m’a toujours semblé particulièrement patent en ce qui concernait les associations ayant trait à l’environnement et à la santé.

Afin de poursuivre son combat, l’USRTK a entamé en février une procédure administrative propre au droit américain par une procédure de FOIA (Freedom of informations request act) auprès de nombreuses universités américaines, de sorte à ce que celles-ci fournissent les mails privés de leurs chercheurs travaillant dans le domaine des biotechnologies. L’association espérait ainsi trouver des preuves de corruption et de manipulation impliquant des chercheurs du public et des industries de biotechnologie. Certaines universités ont refusé, d’autres ont accepté.

Le 5 septembre dernier, le New York Times s’est fait l’écho de cette enquête à charge dans un article intitulé « Food Industry Enlisted Academics in G.M.O. Lobbying War, Emails Show ».

L’article du Monde du 8 septembre n’est rien d’autre qu’un copié-collé de celui du NYT, sans aucun travail d’investigation supplémentaire, ni aucune critique factuelle ou mise à l’épreuve journalistique. Dès lors, les écueils de la version originale se retrouvent tels quels dans la version française.

Rappel des faits : le consensus scientifique

Pour les lecteurs qui découvriraient cette controverse médiatique à propos des OGM, il convient de rappeler très clairement que celle-ci n’existe que dans le microcosme médiatique et militant. Si celui-ci irrigue le grand public à l’écœurement, il n’en demeure pas moins diamétralement opposé à l’état du consensus scientifique sur la question à l’heure actuelle. Cette controverse n’existe pas dans le monde scientifique où les méta-analyses (la collecte, le tri et l’analyse de toutes les données sur le sujet), ne témoignent pas de dangerosité supérieure des OGM alimentaires face aux aliments issus de l’agriculture conventionnelle ou bio. Basé sur la totalité des preuves que nous avons à l’heure actuelle, ce consensus objectif est massif.

Déni des faits : l’activisme US

L’action de l’USRTK a donc spécifiquement ciblé des chercheurs du public qui avaient participé au site internet GMOAnswers, mis en place par Ketchum, la société de relations publiques de certaines firmes technologiques comme Monsanto. Ce site à pour but de répondre clairement et précisément aux questions généralement soulevées dans le grand public à propos des OGM alimentaires. La société Ketchum contacte donc régulièrement des spécialistes académiques de la question afin de fournir les meilleures réponses possibles. Rien d’anormal ni de répréhensible, mais il s’agit apparemment d’un redflag pour les activistes. Au début de la procédure, seuls 14 scientifiques étaient concernés ; ils sont aujourd’hui une quarantaine.

Le journalisme scientifique selon Le Monde

  • Une relative neutralité

Les premiers résultats de cette requête administrative sont ainsi rapportés par Le Monde :

« Salutaire opération transparence sur l’un des sujets environnementaux les plus controversés ? Manœuvre destinée à salir la réputation de chercheurs favorables aux organismes génétiquement modifiés (OGM) ? » Pure rhétorique si l’on se réfère à la position de la section Planète du monde sur le sujet des OGM depuis de nombreuses années. L’hypothèse de la « manœuvre » militante est bien vite oubliée dès le deuxième paragraphe où, sans apporter aucune preuve (tout comme l’article du NYT), Le Monde explique :

« Les courriels publiés montrent comment les firmes agrochimiques utilisent la crédibilité et l’autorité de scientifiques du monde académique dans la guerre d’influence qu’ils livrent à leurs adversaires. »

Or, parmi les quelques 4600 pages de courriels obtenues à ce jour, rien n’a jamais démontré une telle chose.

L’acharnement de l’USRTK, relayé complaisamment par le NYT lui-même docilement copié par Le Monde, s’est rapidement porté vers Kevin Folta, spécialiste en biologie végétale et responsable du département des sciences horticoles de l’université de Floride. K. Folta, de part sa spécialité scientifique, est de longue date un défenseur connu des biotechnologies végétales.

  • Le cas Folta

En dépit d’un cherry picking éhonté de l’USRTK dans la correspondance de Folta, le NYT n’a pas été capable de fournir la moindre preuve des collusions dont il semble vouloir accabler la communauté scientifique. A sa suite, Le Monde n’a pas brillé par son sens de l’investigation pas plus qu’il n’a jugé utile d’assumer la charge de la preuve. Folta s’est expliqué publiquement à propos des citations tronquées qui ont été brandies contre lui, mais face à ce type d’adversaires (les associations d’activistes relayées par des médias nationaux) et au lynchage public en préparation, autant gueuler dans le cul d’une vache.

Ces calomnies portaient notamment sur un don fait à l’université de Floride par un groupe de firmes incluant Monsanto, au profit d’un programme public de communication et de vulgarisation sur les biotechnologies porté par Kevin Folta. Alors que la procédure était légale, connue et déclarée (sans obligation pourtant, le don n’étant pas un financement de recherche et ne portant pas sur le domaine biomédical), ce à côté de quoi le NYT était déjà passé, Le Monde rapporte ainsi l’affaire :

« En août 2014, Monsanto décide de lui verser un « financement sans restrictions » de 25 000 dollars (22 000 euros) pour lui permettre de poursuivre son travail d’influence. « Je vous promets un solide retour sur investissement », écrit le chercheur. »

A en lire Le Monde, on croirait que Folta a secrètement reçu pour son propre compte la somme de 25 000 dollars en payement de son lobbying. La réalité : Folta, en tant que responsable d’un programme de communication scientifique, à accepté le don de firmes privées à un fond destiné à cette communication par l’université de Floride. Ces fonds sont faits pour recevoir ces dons, qu’ils viennent d’institutions/personnes privées ou publiques. Folta est un chercheur public travaillant dans le domaine des biotechnologies végétales dont le secteur privé est nécessairement une source de débouché et de collaboration pour lui et ses étudiants. Il est normal qu’il soit ainsi en relation avec ces firmes privées. Pour ce don, Folta n’a rien reçu à titre personnel, il n’a pas été payé, ses recherches n’ont pas été financées. Au titre de fonctionnaire, la communication et la vulgarisation sont partie intégrante de son activité et il n’est pas dédommagé pour cela. Ces 25 000 dollars versés au fond de l’université de Floride ont dès lors été utilisés pour l’organisation de conférences sur le thème des biotechnologies, indépendamment des projets de recherches de Folta. Conférences que Folta donnait déjà avant que l’université reçoive ce dont, et qui n’ont pas été modifiées après cette réception. La politique de l’Université de Floride est très claire quant à l’allocation de dons privés au profit d’un programme en particulier : « Les dons faits à l’Université de Floride ne peuvent bénéficier à un individu particulier. En conséquence, les dons faits pour soutenir une activité universitaire d’un membre spécifique de la faculté sont nécessairement faits à l’institution et ne peuvent être transférés à une autre organisation ou institution dans le cas où le membre concerné quitterait l’université ».

En clair, ce don, qui n’a profité ni à Kevin Folta ni à ses recherches, a servi à payer des déplacements, des sandwichs, et un rétroprojecteur pour les powerpoints.

Sans plus d’analyse critique et après avoir repris les allégations infondées du NYT, Le Monde explique encore :

« M. Folta se rend notamment en Pennsylvanie et à Hawaï pour être auditionné par les autorités locales sur le sujet. Il rend compte régulièrement de ses activités à l’industrie, qui prend ses frais en charge – ce qu’il omet de déclarer. »

On ne s’étonnera pas d’apprendre que ce récit à charge est une manipulation. En réalité, et comme nous l’apprennent les documents fournis par le NYT, certains voyages de Folta financés grâce aux dons privés lui ont permis de participer à des auditions publiques dans des états où la question de la labellisation des produits GM était en discussion, ou, dans le cas d’Hawaii par exemple, où la limitation des cultures GM et des pesticides était en discussion. Le NYT lui-même par les documents qu’il fournit montre que cette prise en charge des déplacements et du logement était déjà déclarée. Et même ainsi, il n’y a la aucune preuve ni même suggestion qui pourrait satisfaire le fantasme du lobby antiscience d’un chercheur corrompu (ce qui, bien entendu, peut tout à fait exister par ailleurs).

Les allégations produites par Le Monde ont depuis été balayées comme le rapporte Forbes : ces dons étaient connus, déclarés, contrôlés, et n’ont pas profité à Folta, comme l’explique le directeur de l’Institut de l’Université de Floride pour les sciences alimentaires et agricoles, Jack Payne.

  • Le cas Shaw

La cueillette aux cerises continue de plus belle lorsque, reprenant docilement sa copie américaine, Le Monde rapporte comme seul autre cas de corruption David Shaw, chercheur à l’Université d’État du Mississipi :

« Les courriels de David Shaw, vice-président pour la recherche et le développement économique de l’université du Mississippi, sont aussi tombés dans l’escarcelle d’USRTK. Au cours de la dernière décennie, ses travaux ont été financés à hauteur de 880 000 dollars (785 000 euros) par Monsanto. »

Ses travaux n’ont pas « été financés à hauteur de 880 000 dollars par Monsanto ». L’une de ses recherches portant sur le RoundUp (la formulation commerciale du Glyphosate par Monsanto) en agriculture a reçu un soutien financier de 880 000 dollards par Monsanto. Encore une fois, ce financement ponctuel est modique dans les activités et la carrière de Shaw. Comme il a déjà été dit, on pourra regretter que cet exemple, qui ne vient étayer aucune accusation de corruption, ne soit pas représentatif d’une carrière et de dizaines d’articles scientifiques publiés indépendamment et préalablement à ce financement précis. Décidément, les faits n’intéressent pas Le Monde.

  • L’équilibre journalistique

Comme en introduction, Le Monde conclut d’une neutralité toute relative en évoquant pudiquement le financement de chercheurs par l’industrie du bio :

« Reste que USRTK n’a pas procédé à des requêtes de documents ciblant l’industrie de l’agriculture biologique. Et pour cause : celle-ci est le principal financeur de l’association. Le New York Times a donc formulé des requêtes complémentaires auprès de plusieurs universités, cherchant cette fois des liens entre leurs chercheurs et des sociétés misant sur l’agriculture biologique. De tels liens existent même si, note le quotidien américain, « les dépenses en lobbying et en relations publiques de l’agriculture biologique ne représentent qu’une petite fraction de celles des sociétés de biotechnologies ». »

Doux euphémisme. L’image de David contre Goliath ne prend pas, comme on pourra le découvrir dans Forbes.

Il serait grand temps, d’abord et avant tout en ce qui concerne les sections scientifiques de leurs médias, que les journalistes abandonnent l’investigation journalistique, faite de fausse balance et de fausse neutralité, au profit de l’investigation scientifique, où seules les données solidement analysées comptent, indépendamment de ses préférences personnelles. Car c’est bien là ce qui reste de cet article : il est incapable d’étayer par des preuves la position qu’il suggère, et ignore purement et simplement l’état de l’art sur la question qui l’intéresse fondamentalement, à savoir la sécurité des OGM alimentaires. La posture scientifique ne peut être qu’étrangère et hostile à ces manières journalistiques. A quand un traitement médiatique de la négation du consensus scientifique à propos des OGM égal à ce qu’il est à propos de la vaccination ?

Les conséquences de l’obscurantisme

A l’activisme fanatique des uns et à la collaboration éhontée des autres, il ne manquait que le terrorisme : face au lynchage public et aux menaces, l’Université de Floride a décidé de rendre la somme, ce que les donateurs ont refusé. L’université a donc décidé de reverser l’intégralité à une banque alimentaire.

Si cette affaire doit avoir un mérite, c’est peut être celui de révéler la différence de perception de ce qu’est un conflit d’intérêt entre le grand public orienté par les médias activistes et les scientifiques. Dans un grand média national, un don (assez modique), au fond d’une université publique pour favoriser la communication scientifique dans un domaine en particulier est vu comme le versement à titre personnel de pots de vins à des scientifiques corrompus. Comme on l’avait déjà vu lors de l’affaire du verre de glyphosate, les scientifiques sont de très mauvais communicants, ils se défendent très mal. Et pour cause, la violence et la subjectivité des postures médiatiques et politiques ne s’accordent pas avec la science. On pourra ainsi reprocher à Folta de s’être mal défendu sur ses relations avec le secteur privé, de n’avoir pas expliqué que dans ce domaine scientifique comme dans n’importe quel autre, les relations public-privé sont courantes, normales et nécessaires (au demeurant, Le Monde n’est-il pas détenu par un trio d’hommes d’affaires richissimes ?). Les échanges de mails, les co-financements, ne sont pas des preuves de corruption. Je peux moi-même être porté à utiliser des kits de diagnostic médicaux donnés à l’université par les fabricants (l’université ne peut pas tout acheter) : il ne me viendrait jamais à l’idée de me considérer en conflit d’intérêt. Tout au plus l’entreprise donatrice serait dument et publiquement remerciée lors de la communication des activités ayant été facilitées par ce don. Et c’est ce que Folta a fait.

Ainsi, Le Monde rapporte quelques citations fumeuses soigneusement choisies et tronquées, déjà publiées par le NYT. A ce propos, Bruce Chassy, visé par l’action de l’USRTK et contacté par Le Monde aurait déclaré : « chasse aux sorcières ». « Ils explorent nos relations avec les industriels car ils ne peuvent pas contester la vérité de nos arguments ».

Ce constat semble on ne peut plus correct et pourrait être reporté sur les acteurs francophones de cette mouvance ; et pour cause, il a déjà été très bien fait par d’autres : si la science ne va pas dans le sens de l’idéologie, faisons sans la science. Alors que du côté scientifique les innovations, toujours plus porteuses de progrès continuent ; du côté activiste, de part et d’autre de l’atlantique et sous le couvert dévoyé de science citoyenne ou de veille citoyenne, les forces obscurantistes sont à l’œuvre. Heureusement, aussi bruyants que puissent-être les lobbys et leurs chantres médiatiques, quel que soit le bord considéré, le consensus scientifique reste hors de leur porté.

Le public et le décideur politique eux, sont hélas aisément trompés. On a vu en France comment l’action violente et la désinformation avaient gravement pu nuire à la recherche publique en biotechnologie. Alors même que le milieu scientifique peine à se faire entendre auprès du grand public, il serait tout à fait scandaleux et dommageable que les programmes de communication subissent les mêmes pressions rétrogrades. La seule arme des scientifiques, et a fortiori des sceptiques, reste la communication basée sur l’état de l’art, car seules les preuves comptent. Des collusions, corruptions et manipulations pourront être exposées de part et d’autre si elles existent vraiment, les preuves sur la question de fond, elles, resteront. Les menaces physiques, le saccage, l’intimidation judiciaire, les lynchages publics, les manipulations médiatiques, sont les armes de nos adversaires. La posture intellectuelle des deux partis nous oblige à combattre nus et les mains liées face à un adversaire en armes.

Nous laisserons-nous pour autant démembrer par ces nouveaux parabalanis ?

Too Long ; Didn’t Read … (tl;dr)

  • L’USRTK, association activiste anti-OGM américaine a entamé une procédure administrative contre des chercheurs du public en biotechnologies
  • Cette procédure met en lumière des relations industrie-chercheurs saines et légales
  • Les dons reçus étaient légaux et déclarés, Kevin Folta n’a reçu aucun payement personnel de l’industrie
  • Les dons prenaient en charge le défraiement de conférences, Kevin Folta n’a pas été payé pour faire du lobbying ni de la recherche
  • L’aide financière reçue ponctuellement par David Shaw de la part de l’industrie est légale et déclarée
  • Ces faits sont couverts de façon biaisée et sans fact checking par Le Monde

Nouvelle étude Séralini : quand les rats de Monsanto sont gavés au RoundUp

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Ser&Al. 2015 entend montrer que les OGM, pesticides et métaux lourds dans l’alimentation pour rongeurs déciment les rats de laboratoire.

Le jeudi 18 juin, la Tête Au Carré (laTAC), émission de radio quotidienne diffusée sur France Inter, interviewait en exclusivité Gilles-Eric Séralini, professeur de biologie moléculaire de l’université de Caen, à propos de la nouvelle étude choc qu’il s’apprête à publier dans la revue scientifique open access PLOS ONE, à propos de la nourriture des rats de laboratoire.

Si le nom Séralini vous dit quelque chose, ce n’est pas un hasard : le président du comité scientifique du CRIIGEN est à l’origine d’une autre étude publiée en 2012 à son nom, accusant un maïs GM et le RoundUp employé lors de la culture de ce dernier de déclencher l’apparition de tumeurs géantes sur des rats de laboratoire. Cette étude, parue dans des conditions pour le moins inhabituelles en sciences, eut un impact important dans les médias en France et à l’étranger.

Pourtant, sa rigueur scientifique fut rapidement remise en cause, alors qu’on découvrait également que les auteurs étaient sujets à de probables conflits d’intérêts importants. Finalement, le caractère non-reproductible des résultats avancés et les faiblesses méthodologiques révélées invalidèrent les conclusions de l’équipe du professeur Séralini, et le papier est considéré inexploitable par les experts et le reste de la communauté scientifique.

En ce jeudi 18 juin donc, Gilles-Eric Séralini revient sur le devant de la scène, décidé à discréditer ses détracteurs, comme lui l’avait été trois ans auparavant. Revenons ensemble sur cette journée mouvementée.
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[Trad] Une scientifique démonte l’étude de Séralini sur les OGM à paraître dans PLoS One : « une tentative infructueuse de rédemption »

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Article publié par Alison Bernstein sur Genetic Literacy Project le 18 juin 2015

Gilles-Eric Séralini, un biologiste moléculaire de l’université de Caen, espère obtenir la rédemption avec un nouvel article sur l’effet des pesticides et de la nourriture génétiquement modifiée (OGM) des rats et souris de laboratoire. Il n’a pas obtenu cette rédemption.

Il y a quelques années, Séralini a été exposé à la pire humiliation possible pour un scientifique. Le Journal Food and Chemical Toxicology a rétracté son étude. Les éditeurs ont passé en revue les données brutes de cette étude et en ont déduit qu’elles n’étaient pas significatives et ne permettaient pas de tirer les conclusions qui étaient largement répandues dans les gros titres des grands médias. Les auteurs eux-mêmes ont finalement admis que l’étude souffrait de sérieux manquements, et relevaient dans une déclaration de presse que « les données ne sont pas significatives du fait de la sorte et du nombre de rats utilisés ».

D’autres études à long terme, financées sur des fonds publics, n’ont pas pu démontrer de problèmes de santé causés par le maïs OGM ou l’herbicide glyphosate [Ndtr : le Roundup étant la formulation commercialisée par Monsanto du glyphosate]. Le département japonais de toxicologie et santé environnementale a réalisé une étude de 52 semaines sur l’alimentation à base de soja OGM en 2007, et n’a pas pu relever « d’effets nocifs apparents chez les rats » ainsi nourris. En 2012, une équipe de scientifiques de l’école de biosciences de l’université de Nottingham à réalisé une revue de 12 études à long terme (jusqu’à deux ans) et 12 études multi-générationnelles (jusqu’à 5 générations) sur l’alimentation OGM dans le même journal que celui qui a publié l’étude de Séralini. Cette étude a conclu qu’il n’y avait aucun danger apparent pour la santé. Conséquemment, il y a eu une pression croissante sur le journal pour rétracter l’étude de Séralini depuis sa publication en 2012, ainsi que d’autres critiques et un échange de courriers au sein du journal.

Maintenant Séralini a prévu de publier une nouvelle étude, à paraître dans PloS (mais qui n’a pas encore été publiée car le journal à indiqué que l’article nécessitait certains changements éditoriaux) et dans lequel les auteurs ont mesuré les niveaux de différents pesticides, produits chimiques industriels et produits OGM dans 13 marques d’aliments pour rongeurs de laboratoire (remarque : une version antérieure de l’article sous embargo à été distribuée à de nombreux journalistes et sur le site même de Séralini, brisant ainsi l’embargo). Les résultats en eux mêmes ne semblent pas surprenant étant donné l’usage actuel des cultures OGM et pesticides.

Les auteurs prennent ces résultats attendus et posent la question de la validité de toutes les autres études existantes. La conclusion, comme expliqué dans un communiqué de presse, n’est pas fondée : « Il apparaît dès lors que la cause des maladies et troubles observés chez les rats de laboratoires ont été trop rapidement attribués aux caractéristiques génétiques des espèces utilisées » [Ndtr : en 2012, on avait reproché à Séralini d’avoir utilisé une espèce de rats qui présentait naturellement un fort taux de cancer qui ne pouvait donc pas être distingué de l’impact qu’il attribuait à la nourriture OGM à ce propos]. En d’autres termes, les rats meurent à cause des OGM et autres pesticides comme le glyphosate contenus dans les aliments.

En tant que neurologue qui travaille régulièrement avec des animaux de laboratoire, je trouve ces allégations déconcertantes.

Ces résultats ne signifient pas grand chose, étant donné l’absence de toute donnée suggérant une corrélation entre la diète et le phénotype [Ndtr : quelque chose de visible sur les rongeurs dans leur aspect général], une caractéristique, chez les rongeurs de laboratoires. Ils n’ont présenté aucune preuve dans leur propre travail ou travail préalablement publié selon laquelle la contamination de la nourriture est un problème pour la santé des animaux de laboratoire. Ils ne présentent aucune donnée sur la santé animale ni sur quels aliments, donnés à quelle variété produit quel état pathologique visible. Ils ignorent aussi complètement le fait que les différentes sortes de rats ont différents profils pathologiques dont différents taux de développements pathologiques spontanés. Les auteurs ont fait un énorme saut logique en concluant que ces données remettent en question toutes les autres données utilisées comme contrôles externes.

Heureusement, les données mêmes que les auteurs essayent de discréditer ne supportent probablement pas leur conclusion.

Je voudrai aussi souligner que si de tels changements phénotypiques de rongeurs de laboratoires bien connus arrivaient, les scientifiques qui travaillent avec ces animaux le remarqueraient. Lorsque vos animaux de contrôle ne se comportent pas comme ils le devraient (dans leur façon d’être, leur état de santé, leur durée de vie, leur capacité reproductrice, ou quoi que ce soit), c’est un gros signal d’alarme. Si il y avait un problème avec l’alimentation qui causait significativement des pathologies chez les rongeurs de laboratoire, ça serait remarqué dans tous les laboratoires autour du monde.

Si on voulait fouiller les données existantes pour éclaircir ces inquiétudes, on pourrait poser quelques questions sur ces produits OGM et produits chimiques dans l’alimentation des rongeurs pour savoir s’ils ont un impact sur eux.

Quand les cultures OGM ont été introduites dans les années 90, les souris de contrôle ont-elles changé de comportement ? On peut extraire les taux de pathologies spontanées des études publiées avant et après l’introduction des OGM dans l’alimentation des animaux et les comparer. S’il n’y a pas de différence chez les animaux de contrôle avant et après cette introduction, alors l’alimentation de laboratoire composée d’OGM n’a pas eu d’effets sur les animaux de laboratoire.

Une étude publiée l’année dernière à l’université de Californie par Alison Van Eenennaam, spécialiste de génétique animale, a exactement suivi ce principe pour le bétail. Son équipe a examiné presque 30 ans d’études sur le bétail, plus de 100 milliards d’animaux, en comparant leur santé avant et après l’introduction de leur nourriture OGM. Elle n’a trouvé aucune différence chez les animaux.

  1. Plusieurs sortes d’animaux de laboratoire ont été communément utilisées pendant plus de 70 ans. Les résidus de pesticides trouvés dans l’alimentation de laboratoire reflètent l’utilisation des pesticides à ce moment là. Donc, une question évidente est : les phénotypes de ces souris ont-ils changé au fur et à mesure que les pesticides changeaient ? Lorsque les organochlorés ont été bannis en 1970 et remplacés par les organophosphates, a-t-on observé un changement concomitant chez les animaux de laboratoire ? Lorsque le glyphosate a remplacé les herbicides plus toxiques, a-t-on observé des changements dans la santé des animaux de laboratoire ? Encore une fois, on peut répondre à ces questions en comparant les animaux de contrôle à chaque décennie. Si l’état des animaux de laboratoire est resté constant, alors ces changements dans les résidus de pesticides trouvés dans l’alimentation de laboratoire n’ont pas eu d’effet sur leur santé.
  2. Dans l’article de Séralini, les deux aliments utilisés en Italie avaient le plus haut niveau de contaminants, selon les auteurs. Cela soulève une question : est-ce que les animaux dans les laboratoires italiens ont un comportement différent à cause de cette alimentation spécifique ? Une façon plus générale de poser cette question est de savoir si les mêmes sortes d’animaux alimentées avec des aliments qui présentent un niveau différent de contamination ont un comportement différent.

On peut aisément fouiller les données pour répondre à ces questions. Regardons l’exemple des rats Sprague-Dawley pour répondre aux deux premières questions. Ces rats ont été croisés en 1925 et ils ont donc été utilisés expérimentalement pendant assez de temps pour répondre aux questions 1 et 2 posées plus haut. Si on regarde dans les données historiques et actuelles pour ces animaux, on peut voir si il y a eu un quelconque changement chez eux. Cela a déjà été fait dans une lettre de réfutation à l’article précédant du groupe de Séralini. Ces informations sont toujours valables.

« Ce croisement de rat en particulier est bien connu pour être prédisposé à développer des cancers avec l’âge et spécialement en l’absence de restrictions alimentaires. Par exemple, l’étude de Prejean et al., en 1973 a montré une incidence de tumeurs spontanées de 45% chez 360 rats Sprague-Dawley (179 mâles et 181 femelles) dans une série d’études sur 18 mois lors d’expériences sur la cancérogenèse. Le pourcentage de femelles avec une tumeur était presque le double de celui des mâles. Durbon et al., ont rapporté en 1966 une incidence moyenne de 71%, le pic d’incidence chez les rats vieillissant normalement était corrélé à l’âge avec de fortes augmentations dans le développement des tumeurs mammaires, l’une apparaissant autour du 500ième jour après la naissance, et l’autre autours du 660ième, avec un âge médian de 671 +/- 41 jours. Harlan, la compagnie qui a breveté ces animaux, décrit la haute incidence de 76% de tumeurs des glandes mammaires (essentiellement des fibroadénomes) chez les femelles. Keenan et al., ont décrit en 1995 des tumeurs spontanées jusque chez 87% des femelles et jusqu’à 71% des mâles alimentés à volonté. Une restriction alimentaire réduisait significativement l’incidence des tumeurs.

3) Pour répondre à la troisième question, on peut comparer les données des animaux de contrôle dans les études faites dans différents pays. Bien entendu, la meilleure façon de répondre à ces problèmes est une méta-analyse complète de tous les animaux de contrôles dans ces études, séparés par taxons. Cependant, une revue rapide de la littérature pour l’incidence des pathologies spontanées ne semble pas justifier un tel effort. Basiquement, si des changements chez différentes sortes de rongeurs utilisés communément dans les laboratoires arrivaient, nous pourrions les voir dans les données existantes. Si des effets nocifs arrivaient chez les animaux de contrôle, une étude correctement faite devrait rapporter ces effets et nous pourrions voir ces changements chez les animaux de contrôle dans la littérature. Il y a aussi des obligations éthiques et légales à rapporter de tels effets aux équipes vétérinaires et institutions d’éthique de la recherche. De plus, la question de savoir pourquoi les souris de contrôle se comportent de manière différente que toutes les autres souris de contrôle devrait être une question de recherche très intéressante dont les scientifiques voudraient suivre les avancées.

Les auteurs de cette nouvelle étude cherche des réponses à un problème qui n’existe pas. Tout ce que Séralini avait à faire était une recherche bibliographique pour déterminer si c’était effectivement un problème ou non. Ils essaient d’incriminer des facteurs exogènes (contaminations de produits OGM et chimiques) pour des problèmes génétiques. On peut en réalité répondre à beaucoup de questions en fouillant vraiment les données dont Séralini et ses collègues veulent se débarasser. Mais ils n’ont pas cherché à répondre à ces questions et ne peuvent donc faire aucune conclusion excepté que les cultures OGM et des traces de ces pesticides existent dans l’alimentation de laboratoire.

Les auteurs concluent également qu’en raison des graves conséquences pathologiques (non démontrées ici), les recommandations d’étudier plus de groupes d’animaux sont invalides. Ce n’est pas ainsi que les statistiques fonctionnent. Si votre variation est plus importante, vous devez prendre une groupe plus important pour distinguer les tendances. Si il y a effectivement des tendances nettes, la seule chose que cela montre est l’importance de choisir une sorte de souri appropriée pour l’étude.

En fin de comptes, cet article est une tentative à peine voilée d’attaquer le consensus scientifique critique à l’égard du travail précédant de Séralini. Ce nouveau papier ne l’aide aucunement dès lors que ses critiques ne sont pas valides.

Alison Bernstein est une scientifique qui étudie la maladie de Parkinson et vit à Atlanta avec son mari, ses 2 enfants et leurs 2 chats. Suivez là sur sa page FB Mommy PhD et sur Twitter @mommyphd2.

Vaccins = Danger, les preuves scientifiques

VACCINATION, DANGER, AUTISME, THIOMERSAL, MERCURE, ALUMINIUM, FORMALDEHYDE, PETITION, BIG PHARMA, DOUREIOS HIPPOS !!!!!!

Il y a quelques semaines a été lancée une pétition contre les vaccins. En effet, beaucoup de dangers planent sur ceux-ci, et ils sont très bien connus et évalués par la communauté scientifique. Le consensus scientifique à leur propos est clair et massif. Voyons ce qu’il en est.

Les vaccins causent l’autisme

En 1998, un chirurgien britannique, Andrew Wakefield, a publié une étude dans The Lancet, prestigieux journal médical, qui faisait un lien entre le vaccin ROR et l’autisme.

Évidemment, la communauté scientifique alertée s’est penchée sur le danger supposé. Il s’est assez rapidement avéré que personne à travers le monde ne pouvait reproduire les résultats de Wakefield. Et pour cause, son étude à la méthodologie déjà très mauvaise et présentant de très graves problèmes d’éthique, était en outre l’objet de falsifications produites dans le but d’en tirer des bénéfices commerciaux.

Aucune étude entreprise par la suite n’a jamais confirmé de lien supposé entre la vaccination et l’autisme. Les causes de l’autisme sont encore assez mal connues, mais on sait désormais que les signes de syndromes autistiques apparaissent chez les enfants avant la prise du vaccin, et que l’augmentation présumée des cas d’autisme n’est pas corrélée à l’introduction vaccinale, mais d’abord et avant tout à l’amélioration des capacités diagnostiques à ce propos.

En conclusion : en l’état actuel des connaissances, le consensus scientifique est très clair et massif sur le sujet, la vaccination ne cause pas l’autisme, pas plus qu’aucune autre maladie grave souvent alléguée comme Alzheimer ou différents types de cancers.

L’immunité naturelle est plus efficace que la vaccination

Être exposé à une maladie peut en effet donner une immunité très forte. Mais cela n’en demeure pas moins dangereux. En étant exposé naturellement à la rougeole au motif d’acquérir l’immunité contre cette maladie, vous avez 0,1 à 1 chance sur 1000 de mourir (c’est beaucoup ! dans les pays en développement, ce risque est encore plus grand, de l’ordre de 7,5 décès en moyenne pour 1000 cas, et peut atteindre des pics importants). Avec la vaccination, ce risque tombe à 0%, et sans développer les symptômes de la maladie. Au final, la vaccination nous évite en France 76 à 760 décès annuels pour cette seule maladie.

En conclusion : l’état actuel des connaissances scientifiques nous apprend que comme pour tout médicament, un vaccin peut présenter des effets secondaires. Dans l’exemple du vaccin contre la rougeole, si les effets secondaires bénins (fièvre, rougeur au niveau de la piqure…) sont relativement fréquents (10-15%), les effets secondaires graves sont beaucoup plus rares, et leur fréquence est bien inférieure à celle des complications graves liées à la maladie. In fine, la balance risques/bénéfices reste positive pour la vaccination.

Les vaccins contiennent des « toxines »

Beaucoup de peurs sont agitées au motif que les vaccins contiennent des produits apparemment nocifs, comme le mercure, l’aluminium, et le formaldéhyde. Certains de ces produits ont effectivement un effet potentiellement nocif, tout comme le monoxyde de dihydrogène. Ce dernier est pourtant largement ignoré du grand public, alors qu’il cause la mort de nombreuses personnes chaque année, et que la population mondiale y est fortement exposée à chaque instant.

En réalité, il ne faut pas oublier le principe de Paracelse. La dose fait le poison. Ces produits sont bien connus et évalués en permanence, et s’ils se trouvent dans les vaccins, c’est parce qu’ils y sont bien utiles en plus d’y être inoffensifs.

Ces trois produits sont contenus dans une dose extrêmement faible dans les vaccins, bien en dessous de tout seuil de toxicité. Pire encore, le formaldéhyde par exemple, s’y trouve très en dessous du taux de formaldéhyde contenu naturellement dans notre corps ou dans certains fruits et légumes comme les poires. Le taux de formaldéhyde naturellement et continuellement présent dans le sang est ainsi d’environ 2,74 mg par litre. Un jeune enfant possédant un volume sanguin d’environ 2 à 3 litres porte donc naturellement 5 à 9 mg de formaldéhyde sanguin. Si on prend l’exemple du vaccin anti grippal Fluzone de Sanofi-Pasteur qui a fait l’objet de memes sur internet mettant en avant le fait qu’il contienne du formaldéhyde en quantités traces, c’est environ 1 000 000 (1 million) de fois plus que la dose se trouvant dans le vaccin. Pour tout juste arriver à augmenter ce niveau naturel, il faudrait injecter d’un coup 10 millions à 20 millions de doses de vaccins à l’enfant. Le seuil de toxicité potentielle du formaldéhyde étant de 0,2 mg par kg et par jour, un jeune enfant de 20 kg pourra absorber 4 mg de formaldéhyde par jour sans que cela soit encore dangereux, soit l’équivalent de 1 million de doses de vaccin par jour. Il s’agit ici de répondre à des inquiétudes dénuées de toute base critique, comme ça peut l’être dans le cas de peurs fondées sur une mauvaise interprétation du concepts de trace et des ordres de grandeurs. Mais dans tous les cas, quel que soit le vaccin considéré, le niveau de formaldéhyde circulant naturellement dans le corps d’un jeune enfant serait toujours 50 à 70 fois plus élevé que la quantité contenue dans le vaccin, et donc très en dessous des seuils toxiques.

On retrouve les mêmes principes pour les autres produits incriminés.

En conclusion : une connaissance scientifique très basique (savoir reconnaître des unités de mesures simples) et la compréhension du principe de Paracelse permettent de saisir l’inanité des allégations sur le danger des produits contenus dans les vaccins. Par ailleurs, ces produits sont perpétuellement évalués, leurs dangers sont connus, et le consensus scientifique est extrêmement clair : ces produits, aux doses présentes dans les vaccins, ne présentent aucun risque pour la santé, notamment en ce qui concerne les allégations infondées de risques d’autisme et le thiomersal.

L’amélioration de l’hygiène et de la qualité de vie explique la disparition des maladies infectieuses

L’amélioration de l’état pathologique des populations est évidemment poly factorielle. Du XIXe au XXIe siècles, la vaccination n’a pas été la seule avancée médicale, bien qu’elle fut absolument majeure. On a également fait quelques progrès notables du point de vue de l’hygiène publique, de l’urbanisme, de la prise en charge médicale, de la chirurgie… Tous ces éléments jouent bien entendu à différents niveaux sur le taux de mortalité des maladies infectieuses. Il est cependant possible d’isoler chaque paramètre et d’évaluer l’importance de chacun. On voit dès lors que la vaccination reste l’élément central et essentiel permettant l’éradication des infections.

Si l’on reprend l’exemple de la rougeole aux USA par exemple, on voit qu’avant 1963, la date d’introduction du vaccin, la prévalence de la maladie était de plus de 400 000 cas par an. Les standards d’hygiène étaient alors très semblables à ceux que nous connaissons aujourd’hui. En 1970, cette prévalence n’est plus que de 25 000 cas par an, 71 en 2009.

En conclusion : si nos conditions de vie actuelles rendent la maladie moins insupportable que par le passé, elles ne permettent pas de l’éviter. Les effets de l’introduction de la vaccination sont très bien connus, majeurs, et seuls responsables des véritables éradications que nous connaissons aujourd’hui.

Les risques de la vaccination sont supérieurs à ses bénéfices

Comme on l’a déjà évoqué plus haut, tout médicament quel qu’il soit comporte des risques secondaires. Ceux liés à la vaccination sont rarissimes en plus d’être bénins dans la plupart des cas. Quoi qu’il en soit, ces risques sont incomparablement plus faibles que ceux encourus en l’absence de vaccination, dont les complications et issues fatales sont parfois assurées.

En conclusion : en l’état actuel des connaissances, la vaccination n’est associée à aucun risque grave ou courant. Ces risques dérisoires sont par ailleurs à mettre en rapport avec les bénéfices écrasants de la vaccination, par exemple en ce qui concerne le vaccin contre la grippe.

Le vaccin peut donner la maladie contre laquelle il est supposé protéger

Parmi les rares effets secondaires des vaccins (tous les médicaments ont des effets secondaires), certains peuvent rappeler les symptômes provoqués par la maladie contre laquelle doit protéger le vaccin. En ce qui concerne les vaccins désactivés, c’est-à-dire ceux dans lesquels le microbe a été tué, c’est tout simplement impossible. Pour les vaccins vivants, c’est théoriquement possible, mais les symptômes observés sont provoqués par le vaccin, et non pas la maladie réellement entrain de se développer. Dans ce dernier cas, la réaction montre tout simplement de façon visible que la réaction immunitaire attendue a bien été provoquée. En effet, le gonflement, la rougeur et la sensation de chaleur sont les premiers signes visibles d’une réaction immunitaire localisée, exactement comme à l’endroit d’une piqure d’insecte.

On ne connait qu’un seul cas supposé de risque (toujours extrêmement faible), de maladie développée à la suite d’un vaccin devant la prévenir, celui de l’OPV qui a été retiré de la circulation par précaution, et ce malgré des bénéfices énormes pour la santé des enfants à travers le monde.

En conclusion : la sécurité des vaccins notamment au regard du risque de provoquer la maladie contre laquelle ils doivent combattre est très strictement évaluée. Certaines de ces peurs reposent sur des non-sens biologiques (cas des microbes désactivés), et restent dans tous les cas infondées au regard des contrôles stricts et massifs pré et post introduction.


Pétition DTPolio : du Pr. Peter au Pr. Joyeux, plus de 100 ans d’anti-vaccinisme pseudoscientifique

Figure 1 Michel Peter et Louis Pasteur se faisant face à l’Académie de Médecine en juillet 1885, image tirée du téléfilm Louis Pasteur, portrait d’un visionnaire.

En mai dernier a été initiée une nouvelle campagne anti-vacciniste. La chose serait grotesque si elle n’était pas mortifère. Toutes les postures pseudoscientifiques sont plus ou moins dangereuses, ou bien pour la raison, ou bien pour la vie. Mais c’est bien d’un péril mortel dont il est question ici. L’estocade a été portée par un habitué de ce combat pour l’obscurantisme morbide, le Pr. Joyeux, en soutien de l’IPSN. Du Pr. Michel Peter, défenseur patenté de la génération spontanée qui présentait en 1887 devant l’Académie de Médecine un réquisitoire aux données falsifiées, des appels à l’émotion et autres anecdotes contre le vaccin antirabique de Pasteur et fabriquant de toutes pièces des preuves de son inefficacité et dangerosité ; au Pr. Henri Joyeux, adepte de positions pseudoscientifiques et manipulant toujours, quelques 130 ans plus tard, les mêmes sophismes criminels, on serait tentés de se dire que bien peu de choses ont changé. Pourtant, plus d’un siècle les sépare. Les sycophantes chantent, et la meute aboie, toujours. Lire la suite

[Trad] « Le problème c’est l’idéologie ».

ideologie

Billet posté sur Neurologicablog par Steven Novella le 11 juin 2015.

Idéologie : n.f., système d’idées et d’idéaux, spécialement ceux formant le socle théorique de postures politiques et économiques.

C’est mon but, en tant que sceptique et intellectuel de me purger moi-même de toute idéologie, autant que possible. J’en suis venu à comprendre que c’est l’idéologie, dans son sens le plus large, qui est clairement l’ennemie de la raison. Il ne s’agit pas seulement de l’idéologie politique ou économique, mais également religieuse, sociale, et historique.

Intrinsèquement, une idéologie est quelque chose en quoi vous croyez car vous y croyez. C’est une ancre morale et intellectuelle, aussi bien qu’une lunette à travers laquelle vous voyez le monde. Je ne prétends pas que toutes les idéologies sont équivalentes. Nous venons à nos idéologies selon différentes voies, certaines plus valides que d’autres. Nous les acquérons souvent par le biais de notre famille, notre société, et notre culture. La génétique pourrait également jouer un rôle. Nous semblons prédisposés à certaines idéologies politiques basées sur les valeurs qui nous parlent le plus. Nous prenons dès lors ces valeurs comme si elles étaient la Vérité.

Il y a même des idéologies auxquelles on arrive via des arguments et des considérations valides. Je considère le consensus scientifique, qui évalue le doute, la logique, l’empirisme et ses propres connaissances, comme une idéologie valide et digne d’intérêt.

Les idéologies sont encore plus pernicieuses lorsqu’elles deviennent une source d’identité. Un challenge à l’idéologie devient alors un challenge à la personne elle-même, à la fibre même de son être. Les idéologies renforcent les pires aspects de notre nature tribale, séparant le monde entre « eux » et « nous », ceux qui ont vu la Vérité, et ceux, mentalement déficients, qui sont condamnés à se vautrer dans l’ignorance et la confusion.

Il y a souvent une dimension morale à l’idéologie. Les idéologies nous font ressentir que nous n’avons pas seulement raison, mais que nous sommes vertueux et qu’en conséquence la justice nous oblige à être intolérants vis-à-vis des crétins qui offensent notre idéologie.

L’idéologie conduit également au raisonnement orienté, à contraindre nos capacités cognitives non pas pour trouver la meilleure réponse, mais pour défendre celle pour laquelle notre cerveau aura l’attrait le plus primitif et émotionnellement chargé. Lorsque les preuves tendent à satisfaire notre idéologie, nous sommes peu enclins à les questionner. Lorsque les preuves challengent notre idéologie, nous sommes très bons pour leur trouver des reproches.

A ce stade de la lecture, vous êtes probablement entrain de hocher la tête en signe d’approbation, en repensant à toutes ces personnes que vous connaissez et qui semblent parfaitement correspondre à la description de l’idéologue typique que je viens de décrire. C’est facile de reconnaitre de telles positions chez les autres. Le véritable challenge est de les reconnaître chez soi. C’est que dans ce cas là, ça ne semble pas être de l’idéologie bien entendu, mais la Vérité.

Le problème c’est l’idéologie, car elle conduit à l’étroitesse d’esprit, au raisonnement orienté, à l’auto-persuasion d’être juste, et à la rectitude politique. Elle tend à réduire l’investigation sceptique et le discours franc.

Quelle est alors l’alternative ? Je pense que la meilleure solution est de considérer chaque question individuellement selon ses propres modalités et mérites. Cela ne signifie pas qu’il faille ignorer les priorités ni les consensus scientifiques et philosophiques. Cela signifie considérer ces questions aussi objectivement que possible. Cela signifie aussi de vous éloigner émotionnellement de toute étiquette qui pourrait valoir identité et servir de filtre à votre pensée.

On ne peut pas totalement éliminer les étiquettes cependant. Elles sont des guides utiles et aident à organiser notre pensée. Les étiquettes peuvent identifier des philosophies et des principes. Par exemple, je peux penser au capitalisme comme un groupe d’idées et de principes économiques. Je pourrais même considérer le capitalisme comme un système économique valide, et meilleur que les alternatives disponibles. Cependant, dès lors que vous franchissez la ligne floue consistant à vous identifier vous-même comme capitaliste (en terme de philosophie), vous êtes motivé à défendre le capitalisme même contre des critiques légitimes, à minorer ses faiblesses, et à voir les preuves et les évènements à travers un filtre supportant le capitalisme.

C’est la raison pour laquelle je ne m’identifie plus à aucun parti politique. Je juge chaque problème politique et candidat selon ses propres mérites.

Comme autre exemple, je pourrais dire que j’accepte le consensus scientifique actuel sur la théorie de l’évolution, plutôt que de me définir comme un « évolutionniste ».

Comme un activiste sceptique, l’idéologie de laquelle il est le plus difficile de me distancier moi-même est le scepticisme scientifique. Je me considère moi-même comme un sceptique, car c’est cela que je pratique. J’accepte la philosophie du scepticisme scientifique autant que j’accepte le consensus sur l’évolution des espèces, car il est supporté par la logique et les preuves. Mais je dois me garder de franchir la ligne floue de l’idéologie.

Cela signifie que j’évalue chaque nouvelle allégation à l’aune des éléments scientifiquement pertinents, de la logique, des preuves, et non pas de la façon dont elle flatte une position particulière préalablement définie comme « sceptique ». Cela signifie reconnaître les arguments valables même s’ils sont en rupture avec une position traditionnellement défendue par les sceptiques.

En fait, j’essaie de traiter le scepticisme scientifique comme une philosophie plutôt que comme une idéologie. La différence peut être subtile, car les deux sont superficiellement des systèmes d’idées et de principes. L’idéologie tend à être un système de croyances complètement verrouillé par le haut. La philosophie devrait plutôt être un système ouvert d’arguments provisoires et toujours enclins à la révision.

Comme une philosophie, le scepticisme scientifique est également anti-idéologique. C’est un système de méthodes plutôt qu’un système de croyances, et ces méthodes incluent le doute, l’auto-critique, et la nature provisoire de toute connaissance. En fait, dans sa plus pure forme, le scepticisme scientifique ne contient aucune croyance, mais seulement l’application de méthodes qui forment une approche de la connaissance. Il ne nécessite même pas forcément le rejet du surnaturel, mais seulement l’adhésion à la méthode naturaliste car la science ne peut pas fonctionner autrement. Le scepticisme scientifique est agnostique envers toutes les croyances particulières.

Là où le langage est trompeur, c’est que la certitude scientifique concernant une conclusion particulière gravit les sommets vers les 99% (sur le fait que la vie évolue par exemple). Ce faisant, l’acceptation des ces probabilités massives conduit dans la vie de tous les jours à ce que sa reconnaissance devienne difficilement discernable d’une forme de « croyance ». C’est très pratique de dire « je crois en l’évolution », pour dire qu’en réalité j’accepte les preuves scientifiques vertigineuses pointant toutes vers la conclusion que la vie évolue, et qu’il n’y a pas d’alternative à cette théorie qui soit viable, et encore moins sérieuse, pour challenger celle de l’évolution. J’accepte cela comme un fait scientifique établi.

Ce n’est pas facile d’être libre de toute idéologie. Il semble que l’esprit humain se moule facilement et confortablement dans le mode idéologique. Le rejet de l’idéologie pour soi-même demande beaucoup d’énergie pour être maintenu. Le moyen d’y arriver est de suivre un processus valide plutôt que des croyances spécifiques, et d’accepter la nature provisoire de toute connaissance humaine.

Bien entendu, si vous pensez que j’ai tort, je suis ouvert aux autres points de vue.